mardi 10 mars 2009

Situations concrètes et dilemmes

Consigne : en groupe de quatre, on lit des situations réelles. En choisir une ou deux, puis répondre à trois questions :
Face à cette situation :
- ce que ça me fait ?
- ce que je fais ?
- pourquoi ? dans quels buts ?

3.2. Un enfant renverse un jus d’orange en le « faisant exprès »… Il me nargue… Que faire ?

1 . Ce que ça me fait :
- ça m’énerve fortement, ça remet en cause mon autorité devant le groupe-classe. Je me demande si c’est intentionnel (élève d’élémentaire ?)
2. Ce que je fais :
- je lui demande de nettoyer (plusieurs fois), je rappelle la règle ; puis je l’isole, je lui explique pourquoi ; je cède (je nettoie), mais je demande à voir ses parents . (ou je ne cède pas, je continue tant qu’il n’a pas nettoyé) (discussion au sein du groupe)

3. Pourquoi ?
- le but, c’est la réparation de la bêtise. Si on l’isole, c’est pour qu’il se calme (pour qu’il réfléchisse ? il ne faut pas le mettre dans une position où il puisse continuer à faire le clown devant le groupe ?) et qu’il puisse réparer ensuite. Après le nettoyage, il faudra un discours collectif de l’enseignant devant le groupe (retour sur la situation) avec le but de faire comprendre au groupe ce qu’a fait l’enseignant. (voir plus bas les nuances apportées à cette proposition)

Discussion :
- mais on a l’impression qu’il n’est pas énervé, qu’il est froid ? On est plutôt dans une provocation (habituelle ou pas ?). En quoi la sanction de nettoyer règle le problème ? Ce n’est pas l’acte qui pose le problème, ça dépend de l’intention et de la réaction : renverser le jus d’orange, ou être insolent ? Quel est son âge ?
- quand on sanctionne, on risque de ne pas répondre à sa demande d’être reconnu ? Oui, mais on montre que ce n’est pas la bonne méthode
- si on revient sur ce qui s’est passé, avec lui en duo, après le reour à un certain calme, on se sent moins pris dans l’escalade. On peut rétablir la communication grâce à la latence de l’isolement.
- rétablir l’autorité pour cet enfant, ou pour le groupe ? Quand une question est adressée à l’autorité, elle est mise en demeure de répondre…
- voir les parents, à partir de quel seuil ?

Situation 7 : un élève s’énerve, m’insulte, passe à l’acte envers l’enseignante.

Ce que ça me fait :

- conflit entre la posture d’enseignante et la posture d’individu
- conflit sur la gestion de l’affectif (image de soi face au groupe), physique (douleur, somatisation ultérieure), psychologique (déception/culpabilité de ne pas avoir sû anticiper/réguler)
- c’est grave, c’est l’escalade dans le conflit, dans la relation, il ne faut pas laisser passer
- colère car l’enseignante n’est pas protégée, mais aussi que la réponse de la directrice n’est pas adéquate (inspectrice)
- fortement déstabilisé, mais pas en colère
- inquiétude, angoisse, perte de la sécurité interne de l’enseignant
- peur de ce qui va advenir (peur de ma propre violence, aussi)
- sentiment de fragilité, solitude, atteinte de ma personne derrière l’être professionnel
- cascade d’acte en acte qui s’enchaînent, qu’il fait stopper.

Ce que je fais :
Gr1 Gestion de crise
Désamorcer si possible avant la cascade
Attendre le retour au calme de l’élève,
Utiliser la parole
Eviter le conflit frontal dominant/dominé (L’enseignant traite la crise)

recul nécessaire
Installer une distance temporelle
Mettre en place une introspection (refaire le film)

médiation
Avec le directeur incarnation de la loi MAIS risque d’aveu d’impuissance (Quand c’est calmé seulement par le directeur)

pour la suite
Exiger des excuses
Reprendre le déroulé des événements avec le groupe
Oser dire à la classe que l’enseignant a pu s’énervet, qu’on a dépassé la limite
Mettre en place un espace ouvert de parole (cf dans la classe pendant la récré)
Appeler les parents

- gr2 : Chronologiquement, on est d’accord avec ce que fait l’enseignant, sauf au moment du couloir : il aurait fallu un mot qui explique à l’élève la raison de cette première intervention (« c’est parce que… que tu… ») qui pourrait aider à désamorcer. Le « quand je l’aurai décidé » proféré par l’enseignant montre le risque de rupture (l’enseignant commence à glisser, il risque d’être « à égalité » avec l’élève, de confondre « norme scolaire » - on est calme parce que c’est indispensable pour apprendre ensemble- et « normativité sociale – tu dois céder devant moi parce que je suis le plus fort, que je dois te faire plier-). L’enseignant « fait une tentative » qui peut le mettre en danger.
- Ensuite, « l’empoignade » semble légitime pour le contenir. (le fait que ce soit un homme ou une femme n’est pas anodin ?). Le fait de l’emmener dans le bureau du directeur peut permettre de différer, mais il semble nécessaire que l’enseignant règle lui-même la situation. La suppression de la patinoire n’est peut-être pas adaptée (pas cohérente ? encore que la patinoire, c’est dangereux, donc…)
- gr3 : on est sûres que ce n’est pas la première crise, donc il faut anticiper le rapport de corps à corps, de seul à seul (que cherche l’enfant ?) qui fait monter l’anxiété chez l’enseignante qui s’affaisse, les rapports grand/petit s’inversent, l’institutrice est seule. Chercher un tiers. Noter les événements pour ne pas les oublier, les fixer. On l’a tous connue, cette montée de la peur et de la violence.

- Gr4 : Mobiliser l’éventuelle EVS pour avoir l’élève sous les yeux pendant l’exclusion (encore ne pas le laisser seul dans l’état où il est). Essayer de le contenir physiquement en lui parlant doucement pour faire baisser la température. Prendre rendez-vous avec les parents pour régler les deux agressions (élève et enseignant) en impliquant tout le monde dans un contrat à venir, incluant la réparation.

Commentaires collectifs sur la situation :
- Dans cette situation, on n’est pas au niveau du « jus d’orange » du texte 3. Ce type de situation peut relever de la justice, comme toute agression. La question de la sanction se pose.
- Rôle de l’inspecteur et du psychologue scolaire dans « l’après », au niveau institutionnel, pour adopter collectivement des stratégies adaptées à cet enfant (sanction, recours…) pour éviter la « sidération » devant les faits.
- Où se situe la limite entre la contention (la contenance) et la violence ? On peut imaginer un contrôle physique sans violence. C’est une question très importante, qu’on peine à aborder dans le cadre de l’école. Pourtant, nombre d’institutions y ont recours sans pour autant être violentes, en utilisant des protocoles qui cadrent les interventions.
- Et à 16h45 ? qu’est-ce qu’on fait de cet enfant ? On le laisse partir dans le car, ou dans la rue, ou est-ce qu’on appelle tout de suite les parents ? Pourra-t-il revenir demain matin dans la classe comme si rien ne c’était passé ?

Pourquoi j’agis de la sorte ? Avec quels buts ou motifs ?

Gr1 : La sanction de privation de patinoire : par mesure de sécurité ? par représailles ? mais peut-on priver un élève d’un élément du programme (privé de travail ?)

Gr2 : importance des excuses devant le groupe classe pour que chacun retrouve sa place devant le groupe (élève et enseignante).
Mais quel sens des excuses, selon l’âge (s’il n’a pas intégré les règles) ? Parce qu’on doit apprendre à faire « ce qui se fait » (DA)

Discussion :
- Toute la question est de remettre de la parole, du sens, de la pensée, même si la sanction doit être posée comme utile/nécessaire, pour lui et pour tout le monde. Elle permet de ne pas rester dans l’impunité, d’avoir le moyen d’exercer malgré tout sa responsabilité (PF). L’absence de sanction peut aussi être anxiogène.
- Il existe quand même un point commun entre la situation 3 et 7 : rétablir l’autorité, et établir un fonctionnement acceptable en milieu scolaire (c’est à dire la sécurité pour chacun de pouvoir y agir, y penser, s’y développer). C’est l’enjeu de la sanction (DA), élément du processus devrant aussi intégrer la réflexivité sur ce qui s’est passé, et le moyen de trouver un cadre permettant aux élèves de s’y retouver .
- Mais mettre un enfant devant le groupe et le sommer de s’expliquer peut aussi le faire disjoncter, le mettre devant une angoisse encore plus grande. (DA). La question du regard, des valeurs de l’enseignant y joue un rôle déterminant.
- Comment mesurer qu’une sanction est adaptée ou pas ? On sent bien que la privation de patinoire ne correspond pas à « l’irréparable s’est accompli ».
- Ces exemples nous obligent à penser comment on peut fournir à l’enseignant le moyen d’avoir un cadre permettant de mettre du tiers et de la parole, et donc du CADRE INSTITUTIONNEL, de l’équipe. On ne tricote pas tout seul. On ne peut pas fonctionner dans le débordement de l’angoisse.


Pour la prochaine séance (juin) :
- avancer dans la mise en écrit des dispositifs/réflexions/cadres institutionnels mis en œuvre pour travailler ensemble, dans les temps disponibles (écrits brouillons, tableaux de synthèse, cas d’élèves, situations observées, projets…
- pour les formateurs : commencer à synthétiser la démarche engagée, depuis sa conception, les différentes étapes du travail avec le groupe, les déplacements, les observables, les résistances, les avancées, les perspectives

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